“Ensemble, les chrétiens peuvent…”

 — Apr. 23, 200723 avril 2007

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Cet article traite du premier chapître du livret du cardinal Walter Kasper, Manuel d’œcuménisme spirituel (MOES). Le chapître est intitulé “Approfondir la foi chrétienne” et comporte deux parties. Les paragraphes sont numérotés, facilitant ainsi consultation et référence.

La première partie du chapître porte le titre “La Parole de Dieu dans l’Écriture Sainte.” Elle contient beaucoup d’enseignement et d’encouragement. La visée centrale est d’illustrer comment la Parole de Dieu dans la bible peut beaucoup aider les chrétien.nes à se rapprocher les un.es des autres :

“Tout ce qui peut être fait pour que les membres des Églises et des Communautés ecclésiales lisent la Parole de Dieu et le fassent, si possible, ensemble…, tout cela renforce ce lien d’unité qui existe déjà, les ouvre à l’action unifiante de Dieu et renforce le témoignage commun rendu à la Parole salvatrice de Dieu qu’ils donnent au monde.” (au tout début du chapître)

Le texte esquisse ensuite la façon classique dont l’Église catholique romaine entend le trinôme Écriture – Tradition – Magistère (office d’enseignement de l’Église) :

“L’Église reçoit l’unique dépôt de la Parole de Dieu à la fois dans la sainte Tradition et dans l’Écriture sainte. Elle a également été chargée d’interpréter authentiquement la Parole de Dieu et elle a reçu un ministère d’enseignement qui –- citant Vatican II — ‘n’est pas au-dessus de la Parole de Dieu, mais [qui] la sert, n’enseignant que ce qui fut transmis, puisque par mandat de Dieu, avec l’assistance de l’Esprit Saint, il écoute cette Parole avec amour, la garde saintement et l’expose aussi avec fidélité’ (Dei Verbum 10).”

Le rôle central de l’Écriture dans la vie de l’Église –- liturgie, prédication, promotion de l’accès facile à l’Écriture sainte pour tous, etc.– est décrit de façon précise. Pour le propos du MOES, la question-clé est la suivante : Comment les saintes Écritures pourraient-elles être employées de plus en plus comme “des instruments insignes” sur le chemin de l’unité des chrétiens? (n. 14) C’est l’expression “de plus en plus” qui porte la visée de la question ici. Les églises sont appelées à créer de nouveaux espaces pour pouvoir répondre à la question de façon positive, créatrice et généreuse.

L’auteur consacre ensuite une courte section (15 a) à encourager la lectio divina (lecture divine) des Écritures saintes car, “c’est à lui que nous parlons quand nous prions, c’est lui que nous écoutons quand nous lisons les oracles divins.” (Cf. DV, 25; citation de saint Ambroise, Sur les devoirs des ministres, I, 20, 88 : PL 16,50)

Le numéro 15b emploit ici, pour la première fois dans le MOES, l’expression “Ensemble, les chrétiens peuvent…” Elle reviendra constamment, comme un leitmotiv, tout au long de l’ouvrage. C’est là, me semble-t-il, un aspect très heureux du Manuel : il fournit, à intervals réguliers, des jeux de suggestions concrètes, en vue d’un agir commun dans un secteur donné de l’œcuménisme spirituel. Ici même, on trouve quatre suggestions excellentes pour un agir commun des chrétiens autour de l’Écriture sainte.

Le principe de Lund

Cette expression “Ensemble, les chrétiens peuvent…” est une autre façon de formuler la fameuse directive œcuménique qu’on appelle le “principe de Lund.” Lors d’une conférence mondiale de Foi et Constitution, tenue à Lund, en Suède, en 1952, on approuva un texte portant le titre Une parole adressée aux Églises. On y formulait la question suivante :

“Nos églises ne devraient-elles pas se demander si elles désirent avec suffisamment d’ardeur entrer en conversation avec d’autres églises, et si elles ne devraient pas agir ensemble en toutes matières sauf en celles oû des différence de conviction profondes les obligent à agir séparément?” (les italiques sont miennes)

La dernière partie de cette phrase en vint subséquemment à être connue sous le nom de principe de Lund. La déclaration, en fait, était une question appelant réponse. La question vaut encore la peine d’être posée.

Pour ma part, je suis convaincu que, de façon générale, une grosse majorité d’églises (sinon toutes), aujourd’hui, tout en professant en paroles le principe de Lund, sont loin de répondre à la question de façon factuelle, affirmative et substantielle. Les églises, tout simplement, ne s’engagent pas en commun dans les domaines permis ou même recommandés. Et si elles ne le font pas, c’est peut-être qu’elles n’ont pas encore reçu la grâce d’une conversion ecclésiale… difficile. D’une telle conversion naîtrait le désir ardent de rendre témoignage et d’accomplir le ministère ensemble, comme Corps unique du Christ. Il semble y avoir un manque durable de vision et de vouloir, pour vaincre les inévitables obstacles / barrières / inertie institutionnels qui, forcément, étouffent l’élan qu’on nomme ici “Ensemble, les chrétiens peuvent…”

Le mouvement œcuménique de fidélité à la volonté et à la prière du Christ ne saurait progresser de façon substantielle tant et aussi longtemps qu’une masse critique d’églises, à tous les niveaux, ne seront pas prêtes et bien décidées à engager, chacune, 10% au moins de l’ensemble de leurs ressources pastorales ou ministérielles –- en personnel, dans leurs priorités programmatiques, leurs ressources financières, etc. — pour prier, agir, exercer le ministère, rendre témoignage, etc. ensemble. Ce 10% (qui devrait s’élever à 20% dès qu’une vision nouvelle et un nouveau vouloir réconcilié et uni le permettront) représente une “dîme” nécessaire en faveur de la réconciliation et de l’unité dans le Corps unique du Christ. Une telle dîme, instaurée consciemment, permettrrait à une nouvelle culture de réconciliation et de communion de naître. Le coût incontournable : la conversion ecclésiale.

(à suivre)

Posted: Apr. 23, 2007 • Permanent link: ecumenism.net/?p=3108
Categories: Reconciliation & unityIn this article: Bernard de Margerie, spiritual ecumenism, Walter Kasper
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